Un procès à Athènes il y à 2300 ans


Après sa découverte, cette statue de Démosthène fut conservée au Palazzo Columbrano à Naples ; de 1770 à 1929, elle se trouvait à Knole Park dans le Kent ; elle fut acquise par la Glyptothèque de Copenhague en 19294. Les restaurations comprennent le nez, les mains et les orteils
Après sa découverte probablement en Campanie, cette statue de Démosthène, fut conservée au Palazzo Columbrano à Naples ; de 1770 à 1929, elle se trouvait à Knole Park dans le Kent ; elle fut acquise par la Glyptothèque de Copenhague en 19294. Les restaurations comprennent le nez, les mains et les orteils

Restitution du visage de Démosthène – Massalia.net – creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/





Demosthenes Zenothemis_
Audio Démon contre Zénothémis

NOTES

(01) Sur le prêt à la grosse chez les Athéniens, voy. de Vries, De Fenoris nautici contractu, Harlem, 1842, et ma dissertation dans la Revue historique de droit français et étranger, Paris, 1867.

(02) En général, l’étranger ne pouvait pas se présenter en personne devant les tribunaux athéniens. Il était représenté par le proxène de sa nation, ou, s’il était métèque, par son patron, προστάτης. Mais, en matière de commerce maritime, une loi spéciale dérogeait à la règle. C’est en invoquant cette loi que le Marseillais Zénothémis a intenté une action contre l’Athénien Démon. Voy. Hermann, t. III, § 44, et Platner, Process und Klagen bei den Attlkern, p. 87.

(03) Hégestrate avait commis le crime appelé baraterie de patron, crime qui est toujours puni de mort.

(04)  Πρωρεύς l’homme qui se tient à la proue. Il avait un rang intermédiaire entre le pilote κυβερνήτης qui tenait le gouvernail, et les simples matelots ναύται.

(05) Les commerçants intéressés dans une expédition maritime, et parfois même les prêteurs à la grosse, mettaient à bord un agent, un subrécargue, συμπλέων, pour surveiller le capitaine, et les représenter en cas de besoin. La précaution, comme on le voit, n’était pas inutile. Tous ces agents et les simples passagers s’appelaient ἐπιβαταί, par opposition aux gens de l’équipage ναύται. Voy. sur ce point la loi 122, D. De Verborum obligationibus (X.LV.I) et Cujas, ad Africanum, 1. 23, De Obligationibus et acitonibus (éd. Ven., I, p. 1230). Voy. aussi Plutarque, Cato major, cap. 21.

(06)  Le navire avait été frété d’Athènes à Syracuse et retour. Pour rompre le voyage et retourner à Marseille, qui est le port d’armement, Zénothémis a besoin d’un jugement rendu par les autorités du lieu où il a fait relâche; mais les juges de Céphallénie décident que le navire est en état de continuer sa route.

(07) Πρεσβευτὴν ἐκ βουλῆς. Les anciens interprètes, et G. Schaefer lui-même, croient que ces mots désignent un membre du Conseil des Cinq-cents, que les chargeurs envoient à Céphallénie avec une sorte de caractère public ; mais il est facile de voir par le contexte que cet Aristophon était un simple mandataire, avec un caractère purement privé. Ἐκ βουλῆς veut donc dire que la désignation de mandataire a été faite par tous les intéressés au chargement, réunis en assemblée générale. C’est le sens donné par Vœmel.

(08) L’emprunteur à la grosse chargeait sur son navire les espèces fournies par le prêteur, ou les marchandises achetées avec ces espèces. Zénothémis n’avait rien chargé du tout, puisqu’il avait envoyé les fonds à Marseille. Il se défendait en disant qu’après les avoir reçus du ses prêteurs, il avait lui-même prêté ces fonds à Hégestrate, avec affectation sur le chargement. Mais Démon soutient que ce chargement a été acquis de ses deniers, par son emprunteur Protos. La question est donc de savoir à qui appartient le chargement.

(09) Le navire était marseillais, Hégestrate en était à la fois patron et propriétaire. Au départ d’Athènes il avait emprunté sur corps et quille pour payer les loyers de l’équipage et les autres dépenses courantes. En arrivant à Syracuse, il avait épuisé les sommes provenant de cet emprunt, et c’est pourquoi il en contracte un second. De retour au Pirée, Zénothémis ne peut payer les prêteurs qui prennent aussitôt possession du navire, sans contestation de la part de Zénothémis.

(10) Démon parle ici du chargement comme étant sa propriété, parce que ce chargement est affecté au remboursement du prêt qu’il a fait. Mais il est plus difficile d’expliquer comment les blés ont été achetés par l’agent de Démon, quand il a été dit plus haut qu’ils ont été achetés par Protos. Ce sont cependant deux personnes différentes, car pendant la tempête Protos s’est mal conduit, tandis que l’agent des prêteurs a sauvé le vaisseau. C’est sans doute que les achats de blé ont été faits par Protos et payés par l’agent de Démon.

(11)  La dépossession (ἐξαγωγή), dont il s’agit ici est le préliminaire de la revendication. C’est une lutte simulée à laquelle les parties ont recours d’un commun accord. Celui qui est éconduit ou dessaisi engage l’action sous la forme d’une demande personnelle en dommages-intérêts (δίκη βλάβης). Cette procédure rappelle la deductio quœ morîbus fit, qui, dans l’ancien droit romain, servait à engager la revendication per sponsionem, au moyen d’une lutte fictive sur le terrain litigieux. Dans cette lutte les rôles de vainqueur et de vaincu étaient convenus d’avance, et le vainqueur fournissait le vadimonium, c’est-à-dire qu’il s’engageait à comparaître à jour fixe. Du reste, le résultat de la lutte n’avait aucune influence sur la question de possession, ni, par suite, sur l’attribution des rôles de demandeur et de défendeur (voy. Cicéron, Pro Tullio, et Pro Caecina; Bethmann-Holrweg) der Römische Civilprocess, t. II. p. 287). Ces particularités semblent s’accorder assez bien avec ce que nous savons de l’ἐξαγωγή.

(12) C’est-à-dire des mains de notre agent.

(13) L’Attique ne produisait pas le blé nécessaire à sa consommation. Aussi Athènes faisait-elle un grand commerce d’importation avec la mer Noire, la Sicile et l’Égypte. La valeur du blé était soumise à des !lut[nations considérables et donnait lieu à des spéculations ardentes. Voy. par exemple le plaidoyer contre Dionysodore.

(14) Ces faits étaient allégués par Zénothémis incidemment à son action contre Protos, action qui tendait à l’allocation de dommages-intérêts, δίκη βλάνης. Nous ne savons, du reste, quels pouvaient être les papiers soustraits par Protos.

(15)  L’étranger défendeur était tenu de fournir caution, et son adversaire le citait à cet effet devant le polémarque. Ainsi Protos était un étranger, probablement un métèque. Voy. Meier et Schœmann, p. 54.

(16) Κλητεύειν signifie proprement assigner un témoin qui se dérobe, et le forcer à venir donner son témoignage.

(17) La phrase n’est pas finie et ne donne pas un sens bien clair. 

 



Références

Pierre, Brulé, et al., éditeurs. Économie et société en Grèce antique. Presses universitaires de Rennes, 2007,

ΦΩΤΙΑΔΟΥ (Π. Ε.). Ἀττικον δίκαιον. Νομικὴ ἑρμηνεία τῆς Δημοσθένους πρὸς Ζηνόθεμιν παραγραφῆς (extrait d’Ἀθηνᾶ, XXXVI, pp. 109-132, 1923) [compte-rendu]
sem-link Gernet Louis

Les plaidoyers civils de Démosthène, Rodolphe Dareste